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Le pied dans la chaussure (1)

Entretien avec Ottar Schiøtz, historien de la pêche, Sørvågen, février 2015
 

Elle savait depuis son enfance que lorsque les vents étaient forts et que des pêcheurs étaient en mer, ça voulait dire que quelqu’un allait mourir, pris dans les courants. Elle savait aussi que, juste en face de la maison bleue où elle vivait, se trouvait le maelström. Des vents forts et des courants forts, dans cette obscurité, ça ne laissait aucune chance aux bateaux qui voudraient tenter la traversée.
Avant l’aube, elle a décidé d’aller marcher le long de la côte. Ce qu’elle ne savait pas, c’était que cette nuit-là, de nombreux pêcheurs venant de Helgeland avaient tenté de traverser le fjord pour atteindre les îles Lofoten. Elle ne le savait pas, mais elle le craignait, parce que lorsqu’elle s’est mise en marche dans l’obscurité, elle est partie de ce côté : si une flotte de pêcheurs était passée, elle se serait échouée ici, détruite.